Urgences à ne pas méconnaître en médecine
Mohamed Hassane, BOUALI.
Introduction
L'urgence
est définie comme une situation pathologique d'évolution aigue qui nécessite
une prise en charge immédiate ou rapide sans laquelle le pronostic vital ou
fonctionnel pourrait être engagé. Les urgences en médecine regroupent deux
côtés médical et chirurgical, certains préfèrent les classer en 5
groupes : médical, chirurgical, obstétrique, pédiatrique, psychiatrique.
Dans
cet article, on exposera 5 urgences médicales. Certes ce ne sont pas les urgences
les plus fréquentes en médecine, mais c’est justement ici que réside tout
l'intérêt de les avoir choisies : la méconnaissance de ces urgences par l'ensemble du personnel médical cause un
retard diagnostic et thérapeutique, et devant leur évolution fatale le
pronostic vital est souvent engagé.
Donc la rareté de ces
urgences ne diminue pas de l'intérêt de les connaître parfaitement, au
contraire il faut être au courant de leur évolution à court terme, et leur
prise en charge, car elles n'en valent pas moins que les autres urgences fréquemment
rencontrées aux PU.
1. La réaction anaphylactique :
La réaction
anaphylactique est une urgence médicale qui a une expression sémiologique très
variable, elle est sévère pouvant évoluer vers un choc anaphylactique et engager
le pronostic vital du patient. Le choc anaphylactique est un syndrome
caractérisé par l’incapacité du système cardiovasculaire à assurer un débit
sanguin et un transport d’oxygène adaptés, conduisant ainsi a une hypoperfusion
tissulaire et un dysfonctionnement d’organe, d'où l'intérêt de l'institution de
traitement en urgence.
Ce sont
essentiellement les réactions d’hypersensibilité immédiate qui
font l’objet d’une prise en charge dans les services d’urgence, d'où la
nécessité d'être parfaitement connu par le personnel médical des urgences.
Devant tout
patient présentant une réaction d’hypersensibilité immédiate, un bilan
allergologique doit être prescrit (à fin de confirmer l'origine immunologique),
il faut aussi identifier l’allergène responsable, et ne pas oublier de déclarer
la réaction au centre régional de pharmacovigilance lorsqu’un médicament est
impliqué.
L’incidence
globale des réactions anaphylactiques sévères est estimée de 10 à 20 réactions
par an pour 100 000 habitants. Ces résultats restent approximatifs à cause de
l'absence de déclaration des réactions anaphylactiques.
Les
étiologies les plus fréquentes sont imputables aux aliments, aux venins
d’hyménoptères et aux médicaments [2].
L'apparition
brutale de signes cliniques (agitation, confusion, vertige...) aussitôt après
le contact avec un agent déclenchant (l'allergène) doit faire suspecter
une réaction anaphylactique.
le patient
va reporter des notions telles que : le prurit, un goût métallique, sensation
de chaleur diffuse intense ... l'examen clinique du médecin objectivera ensuite
des signes cutanéo-muqueux (Érythème, urticaire, œdème localisé
ou généralisé), Respiratoire (toux sèche, bronchospasme ...), Digestifs
(vomissements, et douleurs abdominales ...), et Cardiovasculaire
(une Hypotension artérielle, et une tachycardie; en l'absence de traitement ces
signes cardiovasculaires peuvent s'aggraver, on aura un collapsus
cardiovasculaire, des troubles de l'excitabilité cardiaque, puis un Arrêt
cardiaque)
Le diagnostic d’une réaction
anaphylactique est fondé sur une triade : les signes cliniques
décrits par le médecin, les résultats du bilan biologique et la
positivité des tests cutanés avec l’allergène suspecté qui a un double
intérêt de confirmer le mécanisme immunologique, et d’identifier l’allergène
impliqué [1].
La classification
clinique de Ring et Messmer (Tableau) permet de stratifier la réaction
anaphylactique en quatre grades de sévérité. Elle devrait être utilisée dans
les services d’urgence, parce qu’elle permet également de guider le traitement.
[3]
Grades de sévérité clinique des réactions d'hypersensibilité
immédiate selon Ring & Messmer
La réaction
anaphylactique nécessite une prise en charge urgente à fin d'éviter l'évolution
vers l'arrêt circulatoire et l'installation de séquelles organiques anoxiques
irréversibles. Elle consiste à rétablir rapidement les fonctions vitales
perturbées (tel que la pression de perfusion cérébrale et coronaire, et la
volémie)
Avant de commencer le traitement, il faut
impérativement rompre le contact entre l'allergène, maintenir le patient en
position allongé, instaurer une oxygénothérapie.
Le
traitement dépend du grade de sévérité, le médecin prescrira pour un grade
I : des antagonistes des récepteurs H1, et une corticothérapie, une
intubation orotrachéale peut être nécessaire ; Pour un grade II :
une association de β2-mimétiques et de corticoïdes ; Pour un grade
III/IV : injection d’adrénaline en urgence, remplissage vasculaire
rapide, glucocorticothérapie, nébulisation de salbutamol.
En cas d'arrêt cardiaque :
– massage
cardiaque externe
–
ventilation au masque et intubation orotrachéale
– injection
de l'adrénaline en IV.
–
remplissage vasculaire rapide
Le pronostic
vital dépend de la rapidité de la prise en charge, en particulier la précocité
de l'administration de l'adrénaline. Tout retard thérapeutique est un facteur
de risque de mauvais pronostic comme l'a démontré déjà plusieurs études
auparavant.
Enfin, il
faut souligner l’impérieuse nécessité de la consultation d’allergologie afin
de : confirmer le mécanisme immunologique de la réaction, détecter
l’allergène responsable, et proposer au patient les mesures d’éducation et
d’éviction qui s’imposent.
On en
conclut que le traitement du choc anaphylactique est fondé sur l’administration
d’adrénaline associée à une expansion volémique, Mais l’adrénaline n’est pas
toujours efficace. Certains cas cliniques réfractaires à l’adrénaline et/ou à
la noradrénaline ont été traités avec succès par des α-agonistes comme la
méthoxamine ou l’aramine [4]. Trois publications récentes rapportent le succès
thérapeutique de 4 cas d’anaphylaxie par injection IV d'arginine vasopressine
là où l'Adrénaline a échoué dans la correction de l’hypotension artérielle ou
du collapsus cardiovasculaire.
Ainsi les
perspectives d’avenir dans le traitement des réactions anaphylactiques sont
centrées sur l’aramine ou l’arginine vasopressine. Néanmoins, une étude
clinique multicentrique devra en préciser au préalable ses conditions
d’utilisation.
Les urgences thyroïdiennes
Bien
qu'elles restent rares, toutes les urgences thyroïdiennes mettent en jeu le
pronostic vital. On distingue trois grandes classes d’urgences thyroïdiennes :
1. Les urgences endocriniennes (principalement : le coma myxœdémateux, la crise
thyrotoxique) ;
2.Les urgences mécaniques compressives ;
3. Les
complications graves des traitements thyroïdiens requérant une intervention
urgente.
Cet article
entreprendra les deux aspects les plus fréquents du premier chapitre, les
urgences thyroïdiennes endocriniennes : l'hypothyroïdie (Myxœdème) qui
touche 0,3 à 13,7 % de la population, et l'hyperthyroïdie (la crise
thyrotoxique) qui touchent jusqu'à 3 % de la population. [6]
Généralement,
elles résultent d'une errance diagnostique prolongée, ou d’une brusque
aggravation provoquée par un facteur déclenchant chez un patient dysthyroïdique
connu [7]. Pour cela le clinicien doit avoir un seuil de suspicion diagnostique
assez bas, et particulièrement si le patient est dans une situation à risque de
dysthyroïdie. Donc le diagnostic positif reste simple dès lors que l'on pense à
l'origine thyroïdienne des symptômes.
Les
dysthyroïdies touchent davantage la femme que l’homme et leur fréquence
augmente avec l’âge. Elle touche jusqu'à 21 % des femmes de plus de 74 ans qui
sont touchées [5,6]. Actuellement le dépistage n'est pas recommandé
systématiquement, ni un traitement qui serait fondé seulement sur des anomalies
biologiques modérées, Néanmoins il faut conserver un seuil de suspicion
clinique bas (c'est-à-dire évoquer une dysthyroïdie au moindre doute).
Cependant, la rareté des urgences
thyroïdiennes, en plus de leurs expressions cliniques polymorphes et
aspécifiques, retardent très souvent le diagnostic, et ce retard même constitue
la principale cause de la mortalité élevé de cette urgence [7].
Le principe
de la prise en charge doit être fondé sur la rapidité d'évoquer le diagnostique
d'une dysthyroïdie, juste après avoir éliminer les diagnostics différentiels
selon la clinique (ceux de la fièvre, de l’insuffisance cardiaque, des troubles
de la conscience, etc.) ; une fois le diagnostic est évoqué il faut rechercher
le facteur déclenchant et le traiter éventuellement (sepsis, infarctus, trauma,
prise médicamenteuse, etc.) ; Instaurer le traitement médical en urgence et
surveiller son efficacité, qui se fait sur la réponse générale à la
thérapeutique et non sur un dosage hormonal thyroïdien, car il met plusieurs
semaines pour se réguler.
2.
Hypothyroïdie :
L’éventail
des signes de l’hypothyroïdie est vaste, mais même si chaqun de ces signes
cliniques (Tableau 1) pris isolément est peu spécifique, l’association d’un
certain nombre d’entre eux doit faire penser au diagnostic avant que le tableau
ne devienne évident.
L’expression
évidente est celle d’un patient de plus de 70 ans, pâle, un peu ralenti,
hypoacousique, anémié, aux téguments infiltrés (œdèmes), ayant la voix rauque.
À ce stade, certains événements intercurrents peuvent précipiter le patient
dans un coma myxœdémateux, qui constitue stade ultime de l’hypothyroïdie.
Les examens
complémentaires (Tableau2) ont pour but de faire le diagnostic positif (dosage
hormonal), étiologique (dosage des anticorps anti-TPO, échographie thyroïdienne),
et de gravité (ECG, Radiographie du thorax, Échographie cardiaque, gazométrie,
bilan infectieux...). À noter que le diagnostic étiologique ne doit en aucun
cas retarder le traitement.
Tableau 1 : signes cliniques de
dysthyroïdie
Il s’appuie
sur deux volets : les mesures symptomatiques et le traitement spécifique :
*Pour les
mesures symptomatique on a : Le réchauffement progressif, la voie veineuse
périphérique, la restriction hydrique au sérum physiologique, un support
ventilatoire pour compenser l'hypoxie et la désaturation, la mise à jeun
(risque d’iléus, de fausses routes) ;
*Puis le
traitement spécifique, qui est un traitement substitutif, il est basé sur la
L-thyroxine (T4).
*Bien que la
T3 soit l’hormone active, son utilisation n’est pas recommandée.
Il ne faut jamais oublier de
rechercher les facteurs qui ont pu déclencher la dysthyroïdie.
Malgré un traitement bien
conduit, la mortalité du coma myxœdémateux reste élevée. Elle est corrélée à la
gravité du tableau initial mais aussi à l’âge et au terrain cardiovasculaire.
3.
Hyperthyroïdie :
Le tableau
classique est facilement identifié mais les signes clinique sont moins connus,
ou non spécifique. Cela ne doit pas faire méconnaître le diagnostic. Ces signes
sont regroupés dans le Tableau 1.
La crise ou
orage thyrotoxique se manifeste par une fièvre et/ou une tachycardie (plus de
100/min) et/ou une fibrillation auriculaire rapide et/ou une insuffisance
cardiaque et/ou des troubles de la conscience (anxiété, agitation délirante ou
coma) et/ou des troubles digestifs (douleur abdominale, diarrhée, nausées).
Tableau 2 : Les examens complémentaires
en cas de crise thyrotoxique et Myxœdème.
Ainsi, face,
par exemple, à une fièvre associée à des troubles de la conscience chez un
patient à l’hyperthyroïdie connue, il faut penser d’emblée à la thyrotoxicose [5].
Les recommandations actuelles incitent alors à instituer le traitement
d’urgence sans attendre le résultat du dosage hormonal.
De même que
pour l'hypothyroïdie les examens complémentaires ont pour but de faire le diagnostic
positif (dosage hormonal), étiologique (AC anti-TPO, et/ou AC anti-récepteurs à
la TSH, Échographie thyroïdienne...) et de gravité (ECG, Radiographie du
thorax, Échographie cardiaque, gazométrie, bilan infectieux...).
Ils doivent
aussi prendre en compte les pathologies fréquemment associées, notamment
auto-immunes (diabète, etc.) Tableau 2
Le patient
doit être dans un environnement de surveillance continue tant que les troubles
ne sont pas régularisés, car son état peut évoluer vers les défaillances
d’organes. Le traitement comporte un volet général et un volet spécifique [7,8].
le traitement général comprend concomitamment
: Voie veineuse périphérique, Sédation par diazépam, Réhydratation au sérum
physiologique, oxygène selon les besoins, Refroidir par des vessies de glace,
Correction de l'hypercalcémie.
Pour ce qu'il en est du traitement spécifique,
il vise à inhiber la synthèse des hormones thyroïdiennes, Il fait appel en
premier lieu aux anti-thyroïdiens de synthèse (ATS) qui inhibent la fonction de
la thyroperoxydase dans toutes ses étapes du métabolisme de l’iode, et dont le
plus utilisé est le Propylthiouracile (PTU), il existe aussi la carbimazole, et
la benzylthiouracile. Par rapport aux autres ATS, le PTU possède une action
supplémentaire, il inhibe la conversion périphérique de T4 en T3.
On peut
utiliser aussi les β- bloquants qui vont s'opposer à l'hyperadrénergie et
inhibent la conversion périphérique de la T4 en T3. La prescription de
corticoïde (Dexaméthasone) peut avoir lieu car en plus de l'inhibition
périphérique qu'ils exercent sur la conversion de T4 en T3, ils préviennent
l'insuffisance surrénalienne fonctionnelle.
le
traitement peut être radical dans certains cas: la thyroïdectomie.
CONCLUSION
Si les
signes classiques des dysthyroïdies sont bien connus des praticiens, les
tableaux cliniques sont souvent trompeurs, y compris ceux des formes graves.
Celles-ci, heureusement rares, constituent une urgence thérapeutique, le
traitement doit être entrepris dès la suspicion d'une dysthyroïdie, et ne doit
pas être retardé par l’attente des résultats biologiques. La mortalité des
dysthyroïdies graves reste néanmoins assez élevée, malgré des traitements bien
conduits, dont les modalités ont peu varié ces dernières années.
Cet article
a entrepris les urgences thyroïdiennes endocriniennes, mais les urgences
thyroïdiennes mécaniques (un chapitre supplémentaire à ne pas méconnaître) sont
sans doute plus fréquentes. Leur traitement est chirurgical en urgence.
Tableau
1&2 : Méga-Guide pratique des urgences, Fiche 71, 499-502. Dominique
Pateron, Maurice Raphaël, et Albert Trinh-Duc.
4. Les céphalées d’urgence :
Les céphalées (ou
céphalalgies: maux de tête) sont un motif de recours aux urgences très
fréquent, la plupart, bien qu’invalidantes, sont des céphalées primaires
bénignes (c'est-à-dire une maladie en soi), mais certaines peuvent être
secondaires à des pathologies graves, comme une hémorragie méningée ou une
encéphalite virale.
Dans ce cadre, le rôle du
médecin «urgentiste» après avoir soulager la douleur, est de reconnaitre les
céphalées graves menaçant le pronostic vital.
(A noter que le fait que les céphalées soient
parfaitement calmées par le traitement symptomatique ne doit pas remettre en
cause la gravité de ce symptôme)
La prise en charge comprend
la détermination de l’intensité,
et la localisation de la douleur (même si l'intensité n'est pas corrélée
à la gravité de ce symptôme, et que sa localisation n'est pas spécifique) [9], la
mesure des constantes vitales, et enfin la recherche des signes
d’alerte ou « drapeau rouge » qui font suspecter une céphalée
secondaire grave nécessitant un traitement spécifique urgent : tout d'abord
l'âge avancé, une première céphalée après 50 ans, une céphalée en coup de
tonnerre ou explosive, céphalée fébrile, céphalée déclenchée par
l’effort : le coït par exemple, céphalée réveillant le patient, sujets aux
antécédents particuliers (immunosuppression [sida, cirrhose hépatique, diabète,
greffe d’organe, etc.], grossesse, post-partum, cancer, anticoagulants,
traumatisme crânien), sensibilité temporale ou douleurs rhumatismales
cervicales ou claudication de la mâchoire [9].
Lorsque le diagnostic de
céphalée primaire est fait, le patient est adressé en consultation à un
neurologue.
Pour les céphalées
secondaires, le traitement et l’orientation dépendent du diagnostic : Nimodipine
et neurochirurgie en cas d’hémorragie méningée, thrombolyse intraveineuse et
unité neurovasculaire en cas d’accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique,
corticoïdes intraveineux et rhumatologie en cas de maladie de Horton,
ceftriaxone en injection intraveineuse et médecine interne en cas de méningite,
antihypertenseurs intraveineux et cardiologie en cas d’encéphalopathie
hypertensive, etc.
5. Le syndrome pneumo-rénal :
Le syndrome
pneumo-rénal (SPR) est une urgence rare qui se définit par l’association d’une
hémorragie alvéolaire le plus souvent asphyxiante et d’une glomérulonéphrite
rapidement progressive [10]. Le SPR est une urgence diagnostic et thérapeutique
car tout retard risque de compromettre le pronostic fonctionnel des poumons et
des reins, et met en jeu le pronostic vital.
La
physiopathologie de ce syndrome reste toujours mal connu, Néanmoins un facteur
déclenchant (présumé infectieux ou toxique) serait incriminé, chez un sujet
génétiquement prédestiné (des individus porteurs du HLA DR2).
Les
étiologies du SPR sont dominées par : les vascularites systémiques nécrosantes
associées aux ANCA (anti-neutrophilic cytoplasmic antibodies), et le syndrome
de Goodpasture.
Deux types
d'anticorps sont associés de façon quasi-constante au SPR :
* les ANCA :
les anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles.
* les
anti-MBG : les anticorps anti-membrane basale glomérulaire, associés au
syndrome de Goodpasture.
Cliniquement,
c'est des patients arrivant en réanimation dans un tableau clinique aigu,
d'apparition brutale, et d'évolution grave, sans diagnostic établi.
Le SPR est
souvent précédé de symptômes peu spécifiques (altération de l’état général, fièvre,
amaigrissement, polyarthralgies). Il associe des symptômes respiratoires
souvent bruyants au premier plan (simple toux, dyspnée ou crachats
hémoptoïques, insuffisance respiratoire aiguë asphyxiante avec hémoptysie), et
une symptomatologie néphrologique pauvre au deuxième plan (œdèmes des membres
inférieurs, hypotension artérielle rare) . Cependant le diagnostic n'est pas
écarté même en l'absence de symptomatologie respiratoire probante.
Devant toute
suspicion de SPR, un examen clinique minutieux à la recherche de signes de
gravité : une atteinte neurologique centrale, ou myocardique, ou des
manifestations digestives sévères, et un bilan biologique (Tableau) permettent
l'évocation diagnostic, l'élimination des diagnostics différentiels,
l'orientation étiologique, et de définir les modalités de prise en charge
thérapeutique [10].
Ce syndrôme
comprend deux entités:
1. les
vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA: l’association d’une dyspnée aiguë, d'hémoptysie, d’infiltrats
pulmonaires et d’une anémie récente est particulièrement évocatrice du
diagnostic. La réalisation d’une
tomo-denssitométrie (TDM) thoracique met en évidence des condensations
alvéolaires ou un verre dépoli, uni- ou bilatéral. La fibroscopie avec LBA
(lavage broncho-alvéolaire) objective un saignement diffus avec un lavage
homogène;
2. Glomérulonéphrite
rapidement progressive : Caractérisée
par une insuffisance rénale aiguë d'aggravation rapide, avec une hématurie et
une protéinurie abondante. En cas de non-concluance des bilans biologiques,
l'étude anatomo-pathologique d'une ponction biopsie rénale (PBR) permet de
poser le diagnostic, et évalue le pronostic fonctionnel rénal, et le pronostic
vital.
Le
diagnostic différentiel du SPR couvre un large éventail de pathologies dont
l’examen clinique et le bilan initial (Tableau) doivent, dans la mesure du
possible, les éliminer. C'est des pathologies qui sont difficiles à distinguer d'un SPR, se
présentant sous forme d'hémorragie
alvéolaire avec néphropathie vasculaire aiguë, comme: un syndrome
catastrophique des anti-phospholipides (CAPS) qui est particulièrement), un
purpura thrombotique thrombocytopénique (PTT) ou d’une sclérodermie.
Les
étiologies du SPR à évoquer en priorité
sont les vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA, et le
syndrome de Goodpasture.
1.
Vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA:
Incriminées
dans 60 à 70 % des SPR; Elles constituent la principale cause de cette
pathologie [11]. Les vascularites sont un groupe hétérogène, elles ont pour
point commun d’être associées avec une fréquence variable aux ANCA. On en
dénombre : la polyangéite microscopique, la polyangéite granulomateuse
(anciennement maladie de Wegener), Le syndrome de Churg et Strauss.
2. Syndrome
de Goodpasture (14 à 20 %) :
Se
présentant généralement comme un SPR « nu », c'est une maladie
auto-immune déclenchée par un facteur précipitant (toxique, infectieux ...)
dans un terrain génétiquement prédisposé [12]. Ce syndrôme est confirmé par la
présence des anticorps anti-MBG et par la ponction-biopsie rénale mettant en
évidence des dépôts linéaires d’IgG anti-MBG.
Plus
rarement, le SPR peut être attribué à un lupus systémique, une cryoglobulinémie
mixte, une néphropathie à IgA et un purpura rhumatoïde ou à une endocardite
infectieuse subaiguë.
Comme pour
toute urgence la PEC du SPR comprend deux étapes:
*Les mesures symptomatiques:
Hospitalisation en réanimation, ventilation mécanique, dialyse; et
*Le traitement spécifique du
SPR : Il est extrapolé à partir du traitement des glomérulonéphrites
extracapillaires, et des traitements de la pathologie responsable du SPR, parce
que aucune étude clinique dans le traitement du SPR n'a été réalisée en raison
de la rareté du syndrôme, son hétérogénéité, et l'impossibilité d'expérimenter
vu l'urgence thérapeutique qui s'impose.
>Cependant
la corticothérapie est systématique car son efficacité est pratiquement admise,
bien que cela n'a toujours pas été démontré.
>L'utilisation
d'immunosuppresseurs (cyclophosphamide, mycophénolate mofétil) est recommendée
: le cyclophosphamide est le seul traitement à avoir prouvé son efficacité à la
phase initiale du syndrome de Goodpasture. Il est aussi le traitement des
références des SPR liés aux ANCA.
>Les
échanges plasmatiques sont une thérapeutique essentielle du SPR et leur
utilisation est cohérente avec la physiopathologie présumée de ce syndrôme.
Une étude
chinoise récente portant sur 221 cas de syndrome de Goodpasture rapporte que
l’utilisation associée des corticoïdes, du cyclophosphamide et des échanges
plasmatiques améliore le pronostic rénal et vital des patients. Pour le SPR lié
aux ANCA l'échange plasmatique reste réservé pour les patients avec une
créatininémie supérieure à 500 µmol/L.
Conclusion :
Le traitement du SPR est une
urgence et doit être débuté dès la suspicion du diagnostic et l’élimination des
diagnostics différentiels, car le pronostic vital est engagé à court terme.
Dans la recherche de solutions thérapeutiques permettant de limiter la survenue
d’effets secondaires, les biothérapies sont certainement une thérapeutique
d’avenir des SPR. Bien qu'il reste rare, le SPR est une urgence à ne pas
méconnaitre, à cause de son évolution rapide et fatale.
* The pulmonary-renal syndrome: A
diagnostic and therapeutic emergency for the internist
and the intensivist/ M. Hié a, N. Costedoat-Chalumeau
a , D. Saadoun a , E. Azoulay b
a. Service de médecine interne 2, hôpital Pitié-Salpêtrière,
47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France
b. Service de réanimation médicale, hôpital Saint-Louis, 1, avenue
Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.
Conclusion :
Il est important de savoir
distinguer une urgence, de connaître son évolution, et faire la liaison avec la
gravité.
Déjà, tous les tableaux aigus
constituent une urgence, sans pour autant que la cause sous-jacente soit d'une
telle gravité pour la vie de la personne; à l'inverse une maladie grave n'est
pas forcément une urgence comme le cancer.
Une autre notion à ne pas
méconnaitre est que les situations qui paraissent très alarmantes peuvent êtres
bénins, alors qu'une urgence vitale peut passer complètement inaperçue,
(exemple : un accès migraineux peut être plus douloureux qu’une urgence
neurovasculaire).
[Médecine
d'urgence, 2013-09-01, Volume 8, Numéro 3, Pages 1-9/ clinicalkey].
La PEC des urgences nécessite
des compétences; en plus de la médecine générale; en traumatologie (fractures,
luxations ...), en anesthésie (urgences chirurgicales), en psychiatrie
(tentative de suicide, de meurtre...), en toxicologie (toxicomanie, les
overdoses...).
L'intérêt de la médecine d'urgence n’est autre que de s'interposer
entre la pathologie et son évolution rapide vers le décès.
01: Société
française d’anesthésie et de réanimation. Prévention du risque allergique
peranesthésique. Recommandations pour la pratique clinique.
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Anesth Reanim 2002;21(Suppl 1):1–180.
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12:
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