Urgences à ne pas méconnaître en médecine

Mohamed Hassane, BOUALI.
Introduction
L'urgence est définie comme une situation pathologique d'évolution aigue qui nécessite une prise en charge immédiate ou rapide sans laquelle le pronostic vital ou fonctionnel pourrait être engagé. Les urgences en médecine regroupent deux côtés médical et chirurgical, certains préfèrent les classer en 5 groupes : médical, chirurgical, obstétrique, pédiatrique, psychiatrique.

Dans cet article, on exposera 5 urgences médicales. Certes ce ne sont pas les urgences les plus fréquentes en médecine, mais c’est justement ici que réside tout l'intérêt de les avoir choisies : la méconnaissance de ces urgences  par l'ensemble du personnel médical cause un retard diagnostic et thérapeutique, et devant leur évolution fatale le pronostic vital est souvent engagé.
Donc la rareté de ces urgences ne diminue pas de l'intérêt de les connaître parfaitement, au contraire il faut être au courant de leur évolution à court terme, et leur prise en charge, car elles n'en valent pas moins que les autres urgences fréquemment rencontrées aux PU.



1.  La réaction anaphylactique :

La réaction anaphylactique est une urgence médicale qui a une expression sémiologique très variable, elle est sévère pouvant évoluer vers un choc anaphylactique et engager le pronostic vital du patient. Le choc anaphylactique est un syndrome caractérisé par l’incapacité du système cardiovasculaire à assurer un débit sanguin et un transport d’oxygène adaptés, conduisant ainsi a une hypoperfusion tissulaire et un dysfonctionnement d’organe, d'où l'intérêt de l'institution de traitement en urgence.

Ce sont essentiellement les réactions d’hypersensibilité immédiate qui font l’objet d’une prise en charge dans les services d’urgence, d'où la nécessité d'être parfaitement connu par le personnel médical des urgences.

Devant tout patient présentant une réaction d’hypersensibilité immédiate, un bilan allergologique doit être prescrit (à fin de confirmer l'origine immunologique), il faut aussi identifier l’allergène responsable, et ne pas oublier de déclarer la réaction au centre régional de pharmacovigilance lorsqu’un médicament est impliqué.

L’incidence globale des réactions anaphylactiques sévères est estimée de 10 à 20 réactions par an pour 100 000 habitants. Ces résultats restent approximatifs à cause de l'absence de déclaration des réactions anaphylactiques.
Les étiologies les plus fréquentes sont imputables aux aliments, aux venins d’hyménoptères et aux médicaments [2].

L'apparition brutale de signes cliniques (agitation, confusion, vertige...) aussitôt après le contact avec un agent déclenchant (l'allergène) doit faire suspecter une  réaction anaphylactique.
le patient va reporter des notions telles que : le prurit, un goût métallique, sensation de chaleur diffuse intense ... l'examen clinique du médecin objectivera ensuite des signes cutanéo-muqueux (Érythème, urticaire, œdème localisé ou généralisé), Respiratoire (toux sèche, bronchospasme ...), Digestifs (vomissements, et douleurs abdominales ...), et Cardiovasculaire (une Hypotension artérielle, et une tachycardie; en l'absence de traitement ces signes cardiovasculaires peuvent s'aggraver, on aura un collapsus cardiovasculaire, des troubles de l'excitabilité cardiaque, puis un Arrêt cardiaque)

Le diagnostic d’une réaction anaphylactique est fondé sur une triade : les signes cliniques décrits par le médecin, les résultats du bilan biologique et la positivité des tests cutanés avec l’allergène suspecté qui a un double intérêt de confirmer le mécanisme immunologique, et d’identifier l’allergène impliqué [1].

La classification clinique de Ring et Messmer (Tableau) permet de stratifier la réaction anaphylactique en quatre grades de sévérité. Elle devrait être utilisée dans les services d’urgence, parce qu’elle permet également de guider le traitement. [3]
Grades de sévérité clinique des réactions d'hypersensibilité immédiate selon Ring & Messmer

La réaction anaphylactique nécessite une prise en charge urgente à fin d'éviter l'évolution vers l'arrêt circulatoire et l'installation de séquelles organiques anoxiques irréversibles. Elle consiste à rétablir rapidement les fonctions vitales perturbées (tel que la pression de perfusion cérébrale et coronaire, et la volémie)
 Avant de commencer le traitement, il faut impérativement rompre le contact entre l'allergène, maintenir le patient en position allongé, instaurer une oxygénothérapie.
Le traitement dépend du grade de sévérité, le médecin prescrira pour un grade I : des antagonistes des récepteurs H1, et une corticothérapie, une intubation orotrachéale peut être nécessaire ; Pour un grade II : une association de β2-mimétiques et de corticoïdes ; Pour un grade III/IV : injection d’adrénaline en urgence, remplissage vasculaire rapide, glucocorticothérapie, nébulisation de salbutamol.

En cas d'arrêt cardiaque :

– massage cardiaque externe
– ventilation au masque et intubation orotrachéale
– injection de l'adrénaline en IV.
– remplissage vasculaire rapide
Le pronostic vital dépend de la rapidité de la prise en charge, en particulier la précocité de l'administration de l'adrénaline. Tout retard thérapeutique est un facteur de risque de mauvais pronostic comme l'a démontré déjà plusieurs études auparavant.
Enfin, il faut souligner l’impérieuse nécessité de la consultation d’allergologie afin de : confirmer le mécanisme immunologique de la réaction, détecter l’allergène responsable, et proposer au patient les mesures d’éducation et d’éviction qui s’imposent.

On en conclut que le traitement du choc anaphylactique est fondé sur l’administration d’adrénaline associée à une expansion volémique, Mais l’adrénaline n’est pas toujours efficace. Certains cas cliniques réfractaires à l’adrénaline et/ou à la noradrénaline ont été traités avec succès par des α-agonistes comme la méthoxamine ou l’aramine [4]. Trois publications récentes rapportent le succès thérapeutique de 4 cas d’anaphylaxie par injection IV d'arginine vasopressine là où l'Adrénaline a échoué dans la correction de l’hypotension artérielle ou du collapsus cardiovasculaire.
Ainsi les perspectives d’avenir dans le traitement des réactions anaphylactiques sont centrées sur l’aramine ou l’arginine vasopressine. Néanmoins, une étude clinique multicentrique devra en préciser au préalable ses conditions d’utilisation.

Les urgences thyroïdiennes 

Bien qu'elles restent rares, toutes les urgences thyroïdiennes mettent en jeu le pronostic vital. On distingue trois grandes classes d’urgences thyroïdiennes : 
1. Les urgences endocriniennes (principalement : le coma myxœdémateux, la crise thyrotoxique) ; 
2.Les urgences mécaniques compressives ; 
3. Les complications graves des traitements thyroïdiens requérant une intervention urgente.
Cet article entreprendra les deux aspects les plus fréquents du premier chapitre, les urgences thyroïdiennes endocriniennes : l'hypothyroïdie (Myxœdème) qui touche 0,3 à 13,7 % de la population, et l'hyperthyroïdie (la crise thyrotoxique) qui touchent jusqu'à 3 % de la population. [6]

Généralement, elles résultent d'une errance diagnostique prolongée, ou d’une brusque aggravation provoquée par un facteur déclenchant chez un patient dysthyroïdique connu [7]. Pour cela le clinicien doit avoir un seuil de suspicion diagnostique assez bas, et particulièrement si le patient est dans une situation à risque de dysthyroïdie. Donc le diagnostic positif reste simple dès lors que l'on pense à l'origine thyroïdienne des symptômes.
Les dysthyroïdies touchent davantage la femme que l’homme et leur fréquence augmente avec l’âge. Elle touche jusqu'à 21 % des femmes de plus de 74 ans qui sont touchées [5,6]. Actuellement le dépistage n'est pas recommandé systématiquement, ni un traitement qui serait fondé seulement sur des anomalies biologiques modérées, Néanmoins il faut conserver un seuil de suspicion clinique bas (c'est-à-dire évoquer une dysthyroïdie au moindre doute).
Cependant, la rareté des urgences thyroïdiennes, en plus de leurs expressions cliniques polymorphes et aspécifiques, retardent très souvent le diagnostic, et ce retard même constitue la principale cause de la mortalité élevé de cette urgence [7].
Le principe de la prise en charge doit être fondé sur la rapidité d'évoquer le diagnostique d'une dysthyroïdie, juste après avoir éliminer les diagnostics différentiels selon la clinique (ceux de la fièvre, de l’insuffisance cardiaque, des troubles de la conscience, etc.) ; une fois le diagnostic est évoqué il faut rechercher le facteur déclenchant et le traiter éventuellement (sepsis, infarctus, trauma, prise médicamenteuse, etc.) ; Instaurer le traitement médical en urgence et surveiller son efficacité, qui se fait sur la réponse générale à la thérapeutique et non sur un dosage hormonal thyroïdien, car il met plusieurs semaines pour se réguler.

2.  Hypothyroïdie :

L’éventail des signes de l’hypothyroïdie est vaste, mais même si chaqun de ces signes cliniques (Tableau 1) pris isolément est peu spécifique, l’association d’un certain nombre d’entre eux doit faire penser au diagnostic avant que le tableau ne devienne évident.
L’expression évidente est celle d’un patient de plus de 70 ans, pâle, un peu ralenti, hypoacousique, anémié, aux téguments infiltrés (œdèmes), ayant la voix rauque. À ce stade, certains événements intercurrents peuvent précipiter le patient dans un coma myxœdémateux, qui constitue stade ultime de l’hypothyroïdie.

Les examens complémentaires (Tableau2) ont pour but de faire le diagnostic positif (dosage hormonal), étiologique (dosage des anticorps anti-TPO, échographie thyroïdienne), et de gravité (ECG, Radiographie du thorax, Échographie cardiaque, gazométrie, bilan infectieux...). À noter que le diagnostic étiologique ne doit en aucun cas retarder le traitement.
Tableau 1 : signes cliniques de dysthyroïdie

Il s’appuie sur deux volets : les mesures symptomatiques et le traitement spécifique :
*Pour les mesures symptomatique on a : Le réchauffement progressif, la voie veineuse périphérique, la restriction hydrique au sérum physiologique, un support ventilatoire pour compenser l'hypoxie et la désaturation, la mise à jeun (risque d’iléus, de fausses routes) ;
*Puis le traitement spécifique, qui est un traitement substitutif, il est basé sur la L-thyroxine (T4).
*Bien que la T3 soit l’hormone active, son utilisation n’est pas recommandée.
Il ne faut jamais oublier de rechercher les facteurs qui ont pu déclencher la dysthyroïdie.
Malgré un traitement bien conduit, la mortalité du coma myxœdémateux reste élevée. Elle est corrélée à la gravité du tableau initial mais aussi à l’âge et au terrain cardiovasculaire.

3.  Hyperthyroïdie :

Le tableau classique est facilement identifié mais les signes clinique sont moins connus, ou non spécifique. Cela ne doit pas faire méconnaître le diagnostic. Ces signes sont regroupés dans le Tableau 1.
La crise ou orage thyrotoxique se manifeste par une fièvre et/ou une tachycardie (plus de 100/min) et/ou une fibrillation auriculaire rapide et/ou une insuffisance cardiaque et/ou des troubles de la conscience (anxiété, agitation délirante ou coma) et/ou des troubles digestifs (douleur abdominale, diarrhée, nausées).
Tableau 2 : Les examens complémentaires en cas de crise thyrotoxique et Myxœdème.
Ainsi, face, par exemple, à une fièvre associée à des troubles de la conscience chez un patient à l’hyperthyroïdie connue, il faut penser d’emblée à la thyrotoxicose [5]. Les recommandations actuelles incitent alors à instituer le traitement d’urgence sans attendre le résultat du dosage hormonal.

De même que pour l'hypothyroïdie les examens complémentaires ont pour but de faire le diagnostic positif (dosage hormonal), étiologique (AC anti-TPO, et/ou AC anti-récepteurs à la TSH, Échographie thyroïdienne...) et de gravité (ECG, Radiographie du thorax, Échographie cardiaque, gazométrie, bilan infectieux...).
Ils doivent aussi prendre en compte les pathologies fréquemment associées, notamment auto-immunes (diabète, etc.) Tableau 2

Le patient doit être dans un environnement de surveillance continue tant que les troubles ne sont pas régularisés, car son état peut évoluer vers les défaillances d’organes. Le traitement comporte un volet général et un volet spécifique [7,8].
 le traitement général comprend concomitamment : Voie veineuse périphérique, Sédation par diazépam, Réhydratation au sérum physiologique, oxygène selon les besoins, Refroidir par des vessies de glace, Correction de l'hypercalcémie.

 Pour ce qu'il en est du traitement spécifique, il vise à inhiber la synthèse des hormones thyroïdiennes, Il fait appel en premier lieu aux anti-thyroïdiens de synthèse (ATS) qui inhibent la fonction de la thyroperoxydase dans toutes ses étapes du métabolisme de l’iode, et dont le plus utilisé est le Propylthiouracile (PTU), il existe aussi la carbimazole, et la benzylthiouracile. Par rapport aux autres ATS, le PTU possède une action supplémentaire, il inhibe la conversion périphérique de T4 en T3.
On peut utiliser aussi les β- bloquants qui vont s'opposer à l'hyperadrénergie et inhibent la conversion périphérique de la T4 en T3. La prescription de corticoïde (Dexaméthasone) peut avoir lieu car en plus de l'inhibition périphérique qu'ils exercent sur la conversion de T4 en T3, ils préviennent l'insuffisance surrénalienne fonctionnelle.
le traitement peut être radical dans certains cas: la thyroïdectomie.

CONCLUSION
Si les signes classiques des dysthyroïdies sont bien connus des praticiens, les tableaux cliniques sont souvent trompeurs, y compris ceux des formes graves. Celles-ci, heureusement rares, constituent une urgence thérapeutique, le traitement doit être entrepris dès la suspicion d'une dysthyroïdie, et ne doit pas être retardé par l’attente des résultats biologiques. La mortalité des dysthyroïdies graves reste néanmoins assez élevée, malgré des traitements bien conduits, dont les modalités ont peu varié ces dernières années.
Cet article a entrepris les urgences thyroïdiennes endocriniennes, mais les urgences thyroïdiennes mécaniques (un chapitre supplémentaire à ne pas méconnaître) sont sans doute plus fréquentes. Leur traitement est chirurgical en urgence.


Tableau 1&2 : Méga-Guide pratique des urgences, Fiche 71, 499-502. Dominique Pateron, Maurice Raphaël, et Albert Trinh-Duc.

4.  Les céphalées d’urgence :

Les céphalées (ou céphalalgies: maux de tête) sont un motif de recours aux urgences très fréquent, la plupart, bien qu’invalidantes, sont des céphalées primaires bénignes (c'est-à-dire une maladie en soi), mais certaines peuvent être secondaires à des pathologies graves, comme une hémorragie méningée ou une encéphalite virale.
Dans ce cadre, le rôle du médecin «urgentiste» après avoir soulager la douleur, est de reconnaitre les céphalées graves menaçant le pronostic vital.
(A noter que le fait que les céphalées soient parfaitement calmées par le traitement symptomatique ne doit pas remettre en cause la gravité de ce symptôme)
La prise en charge comprend la détermination de  l’intensité, et la localisation de la douleur (même si l'intensité n'est pas corrélée à la gravité de ce symptôme, et que sa localisation n'est pas spécifique) [9], la mesure des constantes vitales, et enfin la recherche des signes d’alerte ou « drapeau rouge » qui font suspecter une céphalée secondaire grave nécessitant un traitement spécifique urgent : tout d'abord l'âge avancé, une première céphalée après 50 ans, une céphalée en coup de tonnerre ou explosive, céphalée fébrile, céphalée déclenchée par l’effort : le coït par exemple, céphalée réveillant le patient, sujets aux antécédents particuliers (immunosuppression [sida, cirrhose hépatique, diabète, greffe d’organe, etc.], grossesse, post-partum, cancer, anticoagulants, traumatisme crânien), sensibilité temporale ou douleurs rhumatismales cervicales ou claudication de la mâchoire [9].

Lorsque le diagnostic de céphalée primaire est fait, le patient est adressé en consultation à un neurologue.
Pour les céphalées secondaires, le traitement et l’orientation dépendent du diagnostic : Nimodipine et neurochirurgie en cas d’hémorragie méningée, thrombolyse intraveineuse et unité neurovasculaire en cas d’accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique, corticoïdes intraveineux et rhumatologie en cas de maladie de Horton, ceftriaxone en injection intraveineuse et médecine interne en cas de méningite, antihypertenseurs intraveineux et cardiologie en cas d’encéphalopathie hypertensive, etc.

5.  Le syndrome pneumo-rénal :

Le syndrome pneumo-rénal (SPR) est une urgence rare qui se définit par l’association d’une hémorragie alvéolaire le plus souvent asphyxiante et d’une glomérulonéphrite rapidement progressive [10]. Le SPR est une urgence diagnostic et thérapeutique car tout retard risque de compromettre le pronostic fonctionnel des poumons et des reins, et met en jeu le pronostic vital.
La physiopathologie de ce syndrome reste toujours mal connu, Néanmoins un facteur déclenchant (présumé infectieux ou toxique) serait incriminé, chez un sujet génétiquement prédestiné (des individus porteurs du HLA DR2).

Les étiologies du SPR sont dominées par : les vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA (anti-neutrophilic cytoplasmic antibodies), et le syndrome de Goodpasture.
Deux types d'anticorps sont associés de façon quasi-constante au SPR :
* les ANCA : les anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles.
* les anti-MBG : les anticorps anti-membrane basale glomérulaire, associés au syndrome de Goodpasture.
Cliniquement, c'est des patients arrivant en réanimation dans un tableau clinique aigu, d'apparition brutale, et d'évolution grave, sans diagnostic établi.

Le SPR est souvent précédé de symptômes peu spécifiques (altération de l’état général, fièvre, amaigrissement, polyarthralgies). Il associe des symptômes respiratoires souvent bruyants au premier plan (simple toux, dyspnée ou crachats hémoptoïques, insuffisance respiratoire aiguë asphyxiante avec hémoptysie), et une symptomatologie néphrologique pauvre au deuxième plan (œdèmes des membres inférieurs, hypotension artérielle rare) . Cependant le diagnostic n'est pas écarté même en l'absence de symptomatologie respiratoire probante.

Devant toute suspicion de SPR, un examen clinique minutieux à la recherche de signes de gravité : une atteinte neurologique centrale, ou myocardique, ou des manifestations digestives sévères, et un bilan biologique (Tableau) permettent l'évocation diagnostic, l'élimination des diagnostics différentiels, l'orientation étiologique, et de définir les modalités de prise en charge thérapeutique [10].

Ce syndrôme comprend deux entités:
1. les vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA: l’association d’une dyspnée aiguë, d'hémoptysie, d’infiltrats pulmonaires et d’une anémie récente est particulièrement évocatrice du diagnostic.  La réalisation d’une tomo-denssitométrie (TDM) thoracique met en évidence des condensations alvéolaires ou un verre dépoli, uni- ou bilatéral. La fibroscopie avec LBA (lavage broncho-alvéolaire) objective un saignement diffus avec un lavage homogène;

2. Glomérulonéphrite rapidement progressive : Caractérisée par une insuffisance rénale aiguë d'aggravation rapide, avec une hématurie et une protéinurie abondante. En cas de non-concluance des bilans biologiques, l'étude anatomo-pathologique d'une ponction biopsie rénale (PBR) permet de poser le diagnostic, et évalue le pronostic fonctionnel rénal, et le pronostic vital.

Le diagnostic différentiel du SPR couvre un large éventail de pathologies dont l’examen clinique et le bilan initial (Tableau) doivent, dans la mesure du possible, les éliminer. C'est des pathologies qui  sont difficiles à distinguer d'un SPR, se présentant sous forme  d'hémorragie alvéolaire avec néphropathie vasculaire aiguë, comme: un syndrome catastrophique des anti-phospholipides (CAPS) qui est particulièrement), un purpura thrombotique thrombocytopénique (PTT) ou d’une sclérodermie.

Les étiologies du SPR  à évoquer en priorité sont les vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA, et le syndrome de Goodpasture.
1. Vascularites systémiques nécrosantes associées aux ANCA:
Incriminées dans 60 à 70 % des SPR; Elles constituent la principale cause de cette pathologie [11]. Les vascularites sont un groupe hétérogène, elles ont pour point commun d’être associées avec une fréquence variable aux ANCA. On en dénombre : la polyangéite microscopique, la polyangéite granulomateuse (anciennement maladie de Wegener), Le syndrome de Churg et Strauss.
2. Syndrome de Goodpasture (14 à 20 %) :
Se présentant généralement comme un SPR « nu », c'est une maladie auto-immune déclenchée par un facteur précipitant (toxique, infectieux ...) dans un terrain génétiquement prédisposé [12]. Ce syndrôme est confirmé par la présence des anticorps anti-MBG et par la ponction-biopsie rénale mettant en évidence des dépôts linéaires d’IgG anti-MBG.
Plus rarement, le SPR peut être attribué à un lupus systémique, une cryoglobulinémie mixte, une néphropathie à IgA et un purpura rhumatoïde ou à une endocardite infectieuse subaiguë.
Comme pour toute urgence la PEC du SPR comprend deux étapes:
*Les mesures symptomatiques: Hospitalisation en réanimation, ventilation mécanique, dialyse; et
*Le traitement spécifique du SPR : Il est extrapolé à partir du traitement des glomérulonéphrites extracapillaires, et des traitements de la pathologie responsable du SPR, parce que aucune étude clinique dans le traitement du SPR n'a été réalisée en raison de la rareté du syndrôme, son hétérogénéité, et l'impossibilité d'expérimenter vu l'urgence thérapeutique qui s'impose.
>Cependant la corticothérapie est systématique car son efficacité est pratiquement admise, bien que cela n'a toujours pas été démontré.
>L'utilisation d'immunosuppresseurs (cyclophosphamide, mycophénolate mofétil) est recommendée : le cyclophosphamide est le seul traitement à avoir prouvé son efficacité à la phase initiale du syndrome de Goodpasture. Il est aussi le traitement des références des SPR liés aux ANCA.
>Les échanges plasmatiques sont une thérapeutique essentielle du SPR et leur utilisation est cohérente avec la physiopathologie présumée de ce syndrôme.
Une étude chinoise récente portant sur 221 cas de syndrome de Goodpasture rapporte que l’utilisation associée des corticoïdes, du cyclophosphamide et des échanges plasmatiques améliore le pronostic rénal et vital des patients. Pour le SPR lié aux ANCA l'échange plasmatique reste réservé pour les patients avec une créatininémie supérieure à 500 µmol/L.

Conclusion : Le traitement du SPR est une urgence et doit être débuté dès la suspicion du diagnostic et l’élimination des diagnostics différentiels, car le pronostic vital est engagé à court terme. Dans la recherche de solutions thérapeutiques permettant de limiter la survenue d’effets secondaires, les biothérapies sont certainement une thérapeutique d’avenir des SPR. Bien qu'il reste rare, le SPR est une urgence à ne pas méconnaitre, à cause de son évolution rapide et fatale.

* The pulmonary-renal syndrome: A diagnostic and therapeutic emergency for the internist
and the intensivist/ M. Hié a, N. Costedoat-Chalumeau a , D. Saadoun a , E. Azoulay b
a. Service de médecine interne 2, hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France
b. Service de réanimation médicale, hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.


Conclusion :

Il est important de savoir distinguer une urgence, de connaître son évolution, et faire la liaison avec la gravité.
Déjà, tous les tableaux aigus constituent une urgence, sans pour autant que la cause sous-jacente soit d'une telle gravité pour la vie de la personne; à l'inverse une maladie grave n'est pas forcément une urgence comme le cancer.
Une autre notion à ne pas méconnaitre est que les situations qui paraissent très alarmantes peuvent êtres bénins, alors qu'une urgence vitale peut passer complètement inaperçue, (exemple : un accès migraineux peut être plus douloureux qu’une urgence neurovasculaire).
[Médecine d'urgence, 2013-09-01, Volume 8, Numéro 3, Pages 1-9/ clinicalkey].

La PEC des urgences nécessite des compétences; en plus de la médecine générale; en traumatologie (fractures, luxations ...), en anesthésie (urgences chirurgicales), en psychiatrie (tentative de suicide, de meurtre...), en toxicologie (toxicomanie, les overdoses...).

L'intérêt de la médecine d'urgence n’est autre que de s'interposer entre la pathologie et son évolution rapide vers le décès.




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