AVC : accident vasculaire cérébral


Dekkiche Halima




L’accident vasculaire cérébral (AVC) est un déficit neurologique soudain d’origine vasculaire présumé. C’est une des principales urgences en médecine, diagnostique et thérapeutique, dont la prise en charge est une véritable course contre le temps.
Selon l'OMS, chaque 2 secondes une personne subit un AVC (ischémique ou hémorragique), chaque 5 secondes une personne en meurt, cela ferait plus de 6 millions de décès par an. C'est la première cause d'handicap acquis de l’adulte, la deuxième cause de démence après la maladie d’Alzheimer et la troisième cause de mortalité après le cancer et les pathologies vasculaires en Algérie.
Sa prévalence augmente chaque année et touche une population de plus en plus jeune, ce qui fait de l'AVC un problème majeur de santé publique.

Mais qu’est-ce qu’un AVC ? Quels en sont les différents types ? On ne parle actuellement que de thrombolyse ou thrombectomie comme mesure de traitement, ces méthodes ont-elles prouvé leur efficacité ? Quelles sont les perspectives thérapeutiques d'avenir dans la prise en charge des AVC ?

Il existe différents types d’AVCs : 



  L'AVC ISCHÉMIQUE CONSTITUÉ ou Infarctus cérébral : 

C'est le plus fréquent, il représente plus de 85% des AVCs. C’est un épisode aiguë de dysfonction cérébral, il est consécutif le plus souvent à l'occlusion d'une artère cérébrale causant une ischémie. Les symptômes neurologiques brutaux dépendent de la localisation de l’ischémie cérébrale, et de son étendue. On note : les troubles de l’équilibre ; l'aphasie ; l'hémiplégie, voire le coma.

L'AVC HÉMORRAGIQUE :

Il a un taux de mortalité plus élevé, consécutif à une extravasation aiguë de sang dans le parenchyme cérébral.

 On trouve aussi l'ACCIDENT ISCHEMIQUE TRANSITOIRE :

Défini comme « un épisode de dysfonctionnement neurologique dû à une ischémie focale cérébrale, médullaire ou rétinienne sans preuve d'infarctus aigu".

  Et enfin les THROMBOSES VEINEUSES CEREBRALES causé par l'obstruction d'une veine ou d’un sinus.

Prise en charge d'un AVC :


La thrombolyse :

La thrombolyse est une technique médicamenteuse utilisée pour le  traitement de l’infarctus cérébral qui permet la restauration précoce de la circulation dans le territoire de l’artère intracrânienne occluse, permettant une préservation du tissu neuronal lésé réversiblement dans la zone de pénombre.
Elle consiste en l’administration d’un médicament qui va lyser le thrombus obstruant le vaisseau sanguin. La thrombolyse n’est donc que l’accélération et l’amplification pharmaceutique du processus de la fibrinolyse physiologique, par l’administration du rt-PA (recombinant tissue plasminogen activator) par voie intraveineuse.
Dans le corps humain, la fibrinolyse est un processus de destruction normal, consistant en la dissolution de fibrine sous l’action de la plasmine. Précisons que la fibrine est une protéine plasmique qui entre dans la formation du caillot de sang lors de la coagulation.
La plasmine est une enzyme protéolytique synthétisée dans le foie sous forme inactive, la plasminogène, cette dernière, ayant une grande affinité pour la fibrine, est incorporée avec la fibrine lors de la formation du caillot sanguin. L’activation de la plasminogène se fait grâce à l’urokinase et le tPA (tissu plasminogen activator) . Cette forme active va ensuite agir directement à la dégradation de la fibrine et du caillot.
Plusieurs protéines entrent également dans l’inhibition de ce processus, telle : l’Alpha 2-antiplasmine, et l'inhibiteur de l’activateur du plasminogène le PAI-1 et le PAI-2.















LA FIBRINOLYSE :

La fibrinolyse a une importance capitale dans la protection de l’organisme contre les risques de thromboses, et on trouve plusieurs thrombotiques synthétiques utilisés dans les cas de syndrome coronarien aigu, l’accident vasculaire cérébral ischémique, l’embolie pulmonaire...
On peut citer la streptokinase, l’urokinase et le rt-PA (l’alteplase) qui est le plus utilisé dans le domaine médical à cause de son rapport bénéfices/risques élevé. L'alteplase est le thrombolytique utilisé dans la thrombolyse cérébrale. Il est obtenu par recombinaison génétique à partir du gène «PLAT» situé dans chromosome 8 codant le t-PA. Une fois dans la circulation sanguine, il traverse la barrière hémato-encéphalique et atteint le parenchyme. Il fait son action fibrinolytique comme expliqué ci-dessus.
Plusieurs études et essaies cliniques sont arrivés à prouver l'efficacité de l'alteplase sur la prise en charge de l’infarctus cérébral aigu, et desquelles on a pu déterminer la posologie du médicament, les doses adéquates et surtout le délai d’administration.
Parmi ces essaies on cite :
* L’essai NINDS (National Institute of Neurogical Disorders and Stroke):
C'est l'étude qui a permis l'approbation de l'utilisation de l'rt-PA par le FDA (Agence américaine des produits alimentaires et médicamenteux) et l'EMEA (agence européenne des médicaments). C’est un essai randomisé contre placebo, avec les conditions de 0.9mg/kg de rt-PA par voie IV injecté moins de trois heures après le début des symptômes de l’infarctus cérébral.
L’essai a été fait en deux parties : La première partie (avec 291 patients) destinée à évaluer l’activité du rt-PA dans les 24 heures. La deuxième partie (avec 333 patients) destinée à évaluer le résultat clinique après 90 jours (3mois).
Les résultats étaient les suivants : Pour la première partie l’essai ne nous montre pas de différence significative dans la proportion des malades dont l’état neurologique s’est amélioré au cours des 24 heures entre les deux groupes (placebo vs rt-PA). Pour la seconde partie on a remarqué chez les malades du groupe de rt-PA par rapport au groupe du placebo une augmentation absolue de 11- 13% des critères de l’évaluation fixée qui sont : l’échelle de Rankin pour évaluer le déficit moteur, l’échelle de Glasgow pour l’état de conscience, l’index de Barthel pour la performance dans la vie quotidienne et enfin l’échelle NIHSS.
L’hémorragie cérébrale au cours des 36 h était de 6,4% chez les malades traités par le rt-PA contre 0,6 % chez les malades du groupe placebo. Mais en dépit de la gravité de l’hémorragie sous le rt-PA, la mortalité des malades traités après trois mois était de 17% contre 21% chez le groupe du placebo.
* ECASS III : Il a été réalisé sur 821 personnes, et il a gardé les mêmes conditions que NINDS, en prolongeant le temps entre 3 h et 4 h 30. Les résultats ont approuvé l’hypothèse, et désormais la thrombolyse se fait jusqu’à 4 h3 0.
* IST-3 : Cet essai fournit des évidences que la thrombolyse par perfusion intraveineuse d’alteplase pour le traitement des AVC ischémiques aigus n’a pas d’effet sur la survie ; mais conduit à des améliorations fonctionnelles et une qualité de vie significativement plus élevées chez les survivants, se maintenant sur une période d’au moins 18 mois. Et a même prouvé que la thrombolyse IV pourrait être étendue jusqu’à 6 h post-AVC dans certains cas.
Malgré l’efficacité qu’a prouvée ce traitement, ses risques restent toujours nombreux, graves et difficiles à gérer. Bien de son risque hémorragique, l’interaction rt-PA avec les récepteurs LRP1 (Low density lipoprotein receptor-related protein1) contribue à l’œdème cérébral. Pire, elle contribue à l’apoptose des cellules neuronales en lysant les protéines de la matrice extracellulaire.
C’est pour cela que plusieurs patients n’arrivent pas à bénéficier de ce traitement à cause de ses contre-indications multiples et du délai réduit de 4h 30 entre l’arrivé du patient au service d’urgences et le temps du diagnostic. Un traitement interventionnel a été établi pour prolonger le délai du traitement jusqu’à 24h et pour traiter les malades qui sont inéligibles à la thrombolyse.
















LA THROMBECTOMIE :

La thrombectomie mécanique est une technique qui consiste à recanaliser une artère cérébrale occluse en phase aiguë d'un AVC ischémique à l'aide d'un dispositif mécanique introduit par voie endovasculaire sous contrôle radioscopique ce qui permettra le retrait du caillot. Cette technique assure ainsi la reperfusion et la revascularisation du parenchyme cérébral en souffrance.
Sept essais randomisés contrôlés ont été effectués et ont prouvé l'efficacité et la supériorité de la thrombectomie mécanique. On en cite :

L’essai MR CLEAN : l'étude a été faite sur 500 patients (dont 89% étaient thrombolysés dans les 4h30) ayant un score de NIHSS supérieur à 2. Ils ont bénéficié ensuite d'une thrombectomie effectuée dans les 6 heures après le début des symptômes de l’infarctus cérébral. Les résultats ont prouvé l’efficacité de cette technique : on a remarqué une amélioration clinique à 90 jours, avec une différence absolue de 13,5 % en faveur de l’intervention. Ainsi que les critères d’évaluation secondaires (NIHSS ; mRS ; taux de recanalisation TICI...). L'étude n'a pas montré de différence quant aux taux de mortalité ou d’hémorragie cérébral.

L'essai ESCAPE : ayant confirmé l'efficacité de la thérapie endovasculaire après 12 heures chez les patients ayant un score ASPECT (Alberta Stroke Program Early CT) entre 6 et 10. Cette étude a été bénéfique même chez les patients qui n'ont pas reçu de TIV (thrombolyse intraveineuse).

CONCLUSION :

L'AVC reste une urgence très fréquente qui ne cesse d'emporter des vies, de causer des handicaps physiques et d'affecter  l'état psychique de ses victimes. Pourtant, l'AVC reste vulnérable face à la prévention primaire et secondaire (des récidives) par la maîtrise des facteurs de risques avant un premier épisode d'AVC en agissant précocement et adéquatement devant sa survenue, mais aussi par l'éducation thérapeutique du patient (ETP) et de son entourage afin de se reconstruire sur le plan fonctionnel et psychique après un AVC.
L'AVC n'est donc pas une fatalité et cette information doit être portée à la connaissance de tous les professionnels de santé ainsi qu’ au grand public.

Références :

* Med sci (Paris) 2009 ; 25 : 855-857 / Comment optimiser l'utilisation du tPA ?
* « Se reconstruire après l'AVC et diminuer le risque de récidives » : la phase aiguë, une opportunité éducative. Sandrine JONNIAUX- CHU de Genève.
* Les grands essaies thérapeutiques en neurologie publié par Pierre AMARENCO.
* tPA as therapeutic target in stroke.
* ClinicalKey livre : Treatment- Louis R. Caplan MD – Caplan's strocke, chapter 5, 146-217.
* State of the nation – stroke statistics 2018.
* Lancet, The, 2018-10-06, Volume 392, Numéro 10154, Pages 1247-1256.

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