Oser rêver !



Oser rêver ! 


Yanis AFIR
© Nadjib BOUZNAD
Qui d’entre nous n’a jamais ressenti cet amer émoi d’être obligé de refouler ses rêves en son for intérieur ? Qui n’a jamais subi les moqueries et les persiflages à l’idée même de rêver ? Nous nous sommes accoutumés à ce sentiment, nous l’avons même adopté et entretenu. Nos peurs et nos déceptions engainent notre âme au point de juguler nos ambitions et paralyser complètement nos idées.


Certes c’est une vérité. Nous vivons dans un environnement réfractaire où l’on subit sans cesse différentes formes de persécution et de tyrannie à la moindre once de réflexion, jusqu’à devenir des laquais dépersonnalisés. On finit par faire comme tout le monde, on accepte une existence terne et monotone, on ne cherche plus à être et à faire, mais simplement à mieux paraître ; on se contente de survivre au lieu de vivre réellement.
À force de conformisme, de mimétisme et de singeries, à force d’essayer de remporter l’agrément de ceux qui nous annihilent, on finit par être aliéné. On devient soi-même un cacochyme, snobant ceux qui osent agir, car les mots ne coûtent rien, tandis que les actes sont bien autre chose.
Ou bien serait-ce un moyen pour dédouaner notre inaction et notre passivité ? Pourquoi cherche-t-on à tout prix à faire abandonner aux gens les rêves que l’on n’a pas su réaliser soi-même ? Est-ce vraiment la fatalité à laquelle nous prédestine ce Darwinisme social ?

Fort heureusement, même dans les noirceurs les plus abyssales surgissent parfois des lumières des plus éclatantes ! Chaque jour de braves gens se lèvent et décident de se révolter contre ce sort auquel ils sont assignés, ils bravent le sentiment dominant et affrontent tous les obstacles à même de constituer un handicap pour l’épanouissement de la matière grise. Ils se battent corps et âme pour leurs rêves.
Nous avons chaque jour la chance d’observer des exemples devant nous, il suffit d’être attentif. Prenons nos chers prodiges qui viennent de réaliser un exploit inédit. Ils ne sont pourtant pas si différents ! Ce sont des citoyens comme vous et moi, confrontés au même marasme intellectuel et scientifique et fraichement diplômés de surcroit, n’ayant ni ressource ni pouvoir. Quelle est la différence alors ? Pourquoi sont-ils allés au bout, là où tant d’autres ont abandonné ou carrément refusé d’entamer ? Le secret ne réside que dans une volonté de fer et un cœur vaillant... Il suffit de croire en ce que nous faisons et d’assumer notre combat, aussi petit soit-il, devant les Hommes et devant l’Histoire.

Nous sommes fiers de l’accomplissement de nos compatriotes, nous en tirons une gloire pour nous-mêmes, nous ressentons une certaine appartenance, comme si c’était notre victoire à nous aussi. Tels sentiments sont nobles, mais il ne faut pas les pervertir en usufruit. On ne doit pas agir en jouisseurs par procuration, se contentant d’admirer (voire de récupérer) les accomplissements de ceux qui y ont tout sacrifié, et par la même dédouanant, en parfaits commensaux, notre oisiveté, et en vociférant le même discours une fois l’exaltation de la victoire retombée.
Le meilleur hommage que l’on puisse rendre à ces jeunes gens est d’essayer de suivre leurs pas et apporter nous-mêmes notre pierre à l’édifice. Ils nous ont ouvert les portes, à nous maintenant de poursuivre la quête.

Alors mes chers amis, permettez-moi de paraphraser leur expression : et pourquoi pas ? Pourquoi n’essayons-nous pas ? Quand allons-nous enfin nous réveiller et nous dire « why not » ?
Aucun des mots que je puis exprimer ne pourra égaler les multiples exemples concrets de ceux qui nous ont précédés dans cette quête. Alors honorons les et cessons de renoncer devant la moindre difficulté ! Cessons de justifier notre léthargie par des lamentations putrides et nous cacher derrière une apparente humilité pragmatique. Le jour où nous serons confrontés au fait accompli, le jour où l’on n’aura nous aussi rien d’autre à l’esprit que notre but, sans nous préoccuper de ce qu’on devra sacrifier pour l’accomplir, alors nous pourrons, nous aussi, crier fièrement : Na’al bouha li wela lelour !

La véritable action est intérieure, l’œuvre extérieure n’est que la résultante de l’accomplissement de soi. Alors osons rêver !

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