La Médecine de Demain



La Médecine de Demain


Sarah LAMARA-MOHAMMED



Depuis la nuit des temps, le génie humain n’a cessé d’inventer et de se réinventer. La science a accompli des pas de géant nous projetant chaque jour vers un futur qui aurait relevé de la science-fiction quelques siècles plus tôt. Etant donné l’essor fulgurant de la technologie et ses applications sanitaires infinies, le domaine médical n’est donc pas en reste. Après l’avènement de la pénicilline, de la vaccination et de l’imagerie, il connait, aujourd’hui encore, des avancées prodigieuses. Et tandis que 2018 s’annonce tout aussi prometteur, voici une rétrospective des prouesses scientifiques les plus remarquables ayant jalonné ces dernières années.


Un cœur aux épinards


On se méprendrait aisément à croire qu’il s’agit là du nom d’un plat extrait d’un menu gastronomique alors que c’est l’objet d’une étude publiée dans la revue Biomaterials. En effet, des scientifiques du Worcester Polytechnic Institute au Massachusetts seraient parvenus à élaborer des cardiomyocytes à partir de feuilles d’épinard préalablement traitées par un détergent. Cette dernière étape aurait pour but de dissoudre les cellules végétales et de conserver une charpente de cellulose. « La cellulose est biocompatible et a été utilisée dans une variété de procédés de médecine régénérative, tels que la conception de tissu cartilagineux, osseux et de guérison de plaies » a-t-on rapporté dans le compte rendu de l’expérience. Par la suite, la structure végétale résiduelle a été mise au contact de cellules humaines vivantes qui se sont développées au sein de l’échafaudage de cellulose. Dans un second temps, du sang a été perfusé à travers le réseau de ramifications qui irriguait initialement les cellules végétales. Même si jusqu’alors, d’autres chercheurs avaient réussi à reproduire des tissus à partir d’imprimantes 3D mais ils se heurtaient toujours au même obstacle : la vascularisation. Le fait est qu’ils demeuraient dans l’incapacité de créer les vaisseaux fins et délicats nécessaires à la survie de l’organe. Joshua Gershlak, un diplômé du Worcester Polytechnic Institute au Massachusetts en ingéniorat biomédical ainsi que le co-directeur de cette étude déclare : « le principal facteur limitant la mise au point de tissus est l’absence de réseau vasculaire… Quand j’ai vu la feuille d’épinard, sa racine m’a rappelé l’aorte… » . Grâce à cet exploit, les patients souffrant de crises cardiaques pourraient éventuellement bénéficier d’une substitution du tissu endommagé. Outre les épinards, le même principe pourrait être généralisé à d’autres plantes en vue de régénérer une myriade d’organes. Avis aux végétariens et aux nostalgiques de Popeye !


La cure aux AVC… dans un venin d’araignée ? 

Et si le remède aux AVC se dissimulait dans la redoutable faune australienne ? C’est l’interrogation à laquelle des scientifiques ont tenté de répondre et leur trouvaille est sidérante : La cure aux AVC, deuxième cause de décès dans le monde, serait détenue ironiquement par une araignée tout aussi mortelle : Hadronyche infensa. Il s’agit d’une araignée à toile en entonnoir dont le venin ferait trépasser sa victime en 15 minutes. Par ailleurs, chaque 5 secondes, quelqu’un meurt d’un AVC. Selon une étude publiée dans Proceedings of the National Academy of Sciences, une protéine baptisée Hi1a aurait des propriétés neuro-protectrices contre les dommages cérébraux considérés jusqu’alors irréversibles. La découverte de cette molécule revient à des chercheurs à l’université de Queensland et Monash qui l’ont obtenue à partir du séquençage de l’ADN des toxines constitutives du venin. Elle attira leur attention car sa structure représentait la jonction de deux copies d’une autre substance reconnue pour ses vertus neuro-salvatrices « la Psalmotoxin (PcTx1) ». Par la suite, Hi1a a été synthétisé artificiellement puis injecté à des souris chez qui on avait préalablement induit un AVC. Et les résultats dépassèrent leurs espérances, ce composé s’avéra beaucoup plus efficient que son analogue psalmotoxin. Les lésions étaient amoindries à 80% si la substance était administrée dans les deux heures suivantes, et jusqu’à 65% si la dose était reçue 8h après l’AVC. Les souris bénéficiaires du traitement avaient regagné presque toutes leurs fonctions aux épreuves neurologiques et motrices comparativement aux rats témoins. D’un point de vue physiopathologique, Hi1a agirait au niveau des canaux ioniques sensibles à l’acidité résultant du métabolisme anaérobie, consécutif à l’anoxie cérébrale. Ce changement de PH serait partiellement incriminé dans les lésions occasionnées par l’AVC. Bien que les résultats étaient probants sur les souris en cas d’AVC ischémique mais l’efficacité de Hi1a reste encore à prouver sur les humains et lors d’AVC hémorragiques. Affaire à suivre donc !


Et si nos phobies n’étaient plus qu’un mauvais cauchemar ? 


Des chercheurs de l’université de Cambridge auraient trouvé le moyen « d’effacer » nos peurs de nos esprits en usant d’intelligence artificielle et d’imagerie médicale. Lors d’une expérience regroupant 17 volontaires, ils créèrent chez ces derniers l’équivalent d’une phobie en leur envoyant des électrochocs à chaque fois qu’ils visualisaient une image donnée. Parallèlement, les scientifiques analysaient leur activité cérébrale grâce à des IRM faites en temps réel. Ils développèrent une technique dénommée « decoded neurofeedback », impliquant des algorithmes d’intelligence artificielle grâce auxquels ils parvinrent à lire et à identifier les patterns d’activité cérébrale traduisant le sentiment de peur suscité chez les volontaires. Ce qui est surprenant est que ce même pattern surgissait subrepticement sur l’enregistrement de leur activité cérébrale même lorsque les patients étaient au repos dans l’insouciance totale. A chaque fois que cela se répétait, les scientifiques intervenaient en offrant une récompense aux volontaires, en l’occurrence une somme d’argent. Le motif réel animant ce geste n’a pas été révélé aux patients à qui on a simplement dit que la récompense était liée à leur activité cérébrale. Or, cette manœuvre visait à associer la signature du cerveau spécifique à la phobie induite avec un sentiment de gratification. Si bien qu’au bout du troisième jour, les mêmes images présentées à nouveau aux patients ne leur inspiraient pvlus crainte et sueurs froides. Outre la médication, les méthodes employées, à ce jour, pour remédier à une phobie consistent à confronter le patient à ses hantises. Il doit par-là revivre une expérience traumatisante et reconditionner sa réaction vis-à-vis d’elle. Il va sans dire que ces protocoles-là connus sous le nom de « aversion therapy » ne sont pas dépourvus d’appréhension et d’effroi pour le malade. A titre d’exemple, quelqu’un victime d’un accident de noyade et ayant développé en conséquence une phobie des baignades doit pour s’en affranchir se jeter à l’eau au sens propre comme figuré. Fort heureusement, si cette percée scientifique venait à trouver son application dans la pratique courante, les pires frayeurs seraient neutralisées à l’échelle même du subconscient. Les patients n’auraient plus à tentir d’araignée ou encore à se cloîtrer dans un espace exigu pour dépasser leurs phobies. Il était temps !


La clé de la jeunesse éternelle ? 

La notion de « rajeunissement » vous évoquerait peut-être les cures de Botox aux sommes faramineuses ou encore les mythes et légendes autour de l’eau de jouvence. Et pourtant, c’est dans la revue « Science » qu’une équipe de chercheurs y fait mention. Ces scientifiques issus de l’université de Harvard seraient parvenus à faire rajeunir des souris à l’aide d’une molécule : le Nicotinamide Adénine Dinucléotide à savoir NAD+. Cette substance aurait la particularité de protéger l’ADN des dommages accompagnant le vieillissement cellulaire et même d’annuler ceux préexistants. Tout a démarré en 2013, lorsque les auteurs de cette étude avaient remarqué la présence du NAD+ en quantités plus importantes chez les cellules plus jeunes. Et lorsqu’ils haussèrent les taux de cette substance chez des souris âgées, ces dernières rajeunirent. « Les cellules des souris âgées étaient impossibles à distinguer des cellules de souris jeunes » confia David Sinclair, responsable du projet de recherche. Cette découverte s’expliquerait par l’action adjuvante du NAD+ vis-à-vis du PARP1, un élément essentiel à la réparation de l’ADN. Au cours d’une division cellulaire, notre génome doit se répliquer mais ce processus n’est pas exempt d’erreurs, puisqu’il s’accompagne parfois de mutations. Des lésions génomiques émergent également lorsqu’on s’expose aux ultraviolets solaires. Cependant, grâce au PARP1 stimulé par le NAD+, l’ADN est restauré. Or, les niveaux du Nicotinamide Adénine Dinucléotide déclinent naturellement au fur et à mesure du temps et les cellules deviennent sénescentes. Pour pallier à ce phénomène, les chercheurs ont synthétisé un précurseur du NAD+ dénommé « Nicotinamide Mononucléotide » (NMN). Cette découverte pourrait profiter aux cancéreux sous radiothérapie ou même à tout employé exposé aux radiations dont les effets délétères sur l’ADN ne sont plus à prouver. « Si je devais me faire prescrire une radiographie ou une tomodensitométrie, je consommerais du NMN préalablement. » préconise David Sinclair. Les portées de cette étude dépasseraient même les frontières terrestres puisque l’équipe de chercheurs est en collaboration avec la NASA en vue de prévenir les effets nocifs des radiations cosmiques chez les astronautes en expédition sur Mars.


Références

 https://www.livescience.com/58445-spinach-turned-intohuman-heart-tissue.html https://news.nationalgeographic.com/2017/03/humanheart-spinach-leaf-medicine-science/ http://www.bbc.com/news/health-39335367 http://www.independent.co.uk/life-style/health-and-families/health-news/spider-venom-stroke-funnel-web-braindamage-doctors-deadly-pnas-australia-hadronyche-infensa-a7640701.html https://www.theguardian.com/science/2017/mar/20/deadly-spider-venom-could-ward-off-stroke-brain-damage-saydoctors-funnel-web http://www.dailymail.co.uk/sciencetech/article-3957412/ The-stress-free-way-beat-fear-Scientists-reveal-subconscious-brain-training-cure-phobias.html https://www.thesun.co.uk/news/2236170/scientists-cannow-use-artificial-intelligence-to-eradicate-phobias-byrewriting-your-bad-memories/ https://www.healthcentral.com/article/new-technologycould-treat-phobias https://www.ndtv.com/world-news/new-artificial-intelligence-therapy-to-help-overcome-fear-study-1631208 http://mashable.com/2016/11/21/mental-health-fear-artificial-intelligence-technique/#qxESWdEHCqqx http://time.com/4711023/how-to-keep-your-dna-fromaging/ https://www.sciencealert.com/scientists-have-successfully-reversed-dna-ageing-in-mice image de l’arrière plan conçue par Freepik

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